Le sujet de la retraite, et particulièrement du critère simplifié d’un âge de départ, est souvent perçu comme un « cadeau » ou une « punition » qui nous serait fait. Pour nous, militant·e·s CGT, il s’agit de bien plus que cela. C’est un vrai choix de Société, profond, qui est le socle même de la vision de la Société dans laquelle nous voulons vivre.
Il y a à peine 80 ans, à la suite des effroyables exactions que l’humanité s’est infligée à elle-même, il a été décidé dans une France en ruine d’appliquer un des points cruciaux du programme du Conseil National de la Résistance : la création de la Sécurité Sociale. Et c’est à Ambroise Croizat, Ministre du Travail d’alors, que la mission de mettre en place cette sécurité sociale fut confiée. Et c’est aux salarié·e·s que le Ministre a demandé de la construire, non pas à l’État ni au patronat, tous deux discrédités par la période de l’Occupation.
Depuis, le capital attaque sans relâche la Sécurité Sociale qui perd à chaque fois un peu plus son rôle d’organisation de salarié·e·s, financée par leur travail. Ces attaques prennent principalement la forme de réduction de la part des cotisations dans son financement, réductions partiellement compensées par l’introduction de l’impôt. C’est loin d’être anodin car cela représente une perte concrète de pouvoir du travail face au capital.
Sommes-nous ici-bas pour seulement valoriser le capital d’autres ? Sommes-nous astreints de confier le pouvoir aux quelques-uns qui détiennent la plus grande part du capital ? Pouvons-nous être capables de nous organiser pour que notre activité au travail serve les intérêts collectifs du soin ? Sommes-nous contraints par nature à vivre pour servir les intérêts d’un petit nombre ? Avons-nous les moyens de décider collectivement de l’intérêt de tous et toutes ?
Le sujet de l’âge de départ à la retraite est souvent l’angle par lequel sont menées les agressions contre la Sécurité Sociale. Cela masque la vraie question :le travail doit-il permettre la vie en Société solidairement, ou doit-il servir à augmenter les dividendes perçus par quelques-uns ? C’est la question du pouvoir sur le travail qui se pose.
À la CGT nous pensons que le travail produit les richesses suffisantes pour financer correctement les besoins de l’ensemble des travailleurs et travailleuses de France, et en particulier celui de permettre de ne plus être soumis au joug d’un employeur à partir de 60 ans, et pouvoir ainsi jouir de la vie en bonne santé avec la même liberté économique que la période de travail passée. Nous pensons qu’actuellement nous en sommes empêchés pour deux raisons.
D’abord le capital ne supporte pas de voir les centaines de milliards d’euros annuels de cotisations lui échapper des mains sans pouvoir s’y servir grassement.
Ensuite il y a la volonté de maintenir une hiérarchie sociale forte : les femmes doivent continuer à être moins bien payées que les hommes à travail égal, les faibles revenus n’ont qu’à se contenter de quelques miettes qu’ils se paieraient eux-mêmes avec leurs propres impôts (revenu universel, TVA « sociale » et autres inepties).
Combattre la volonté du patronat — soutenue par une frange de plus en plus large du spectre politique — de se réserver à lui seul le droit de vie ou de mort sur les salarié·e·s, des droits et devoirs auxquels ils et elles devront se soumettre, c’est se libérer comme cela a déjà été fait par le passé, pour le bien de toutes et tous.
Pour financer le droit de partir à la retraite à 60 ans, à taux plein, il y a des tas de solutions parmi lesquelles :
– revenir sur toutes les exonérations de cotisations sociales, particulièrement dans les grandes entreprises
– appliquer réellement l’égalité salariale entre femmes et hommes
– augmenter les salaires
– diminuer le temps de travail pour travailleur toutes et tous, et mieux
– diminuer le coût du capital
Rien de tout cela n’est impossible. La Société a su beaucoup évoluer au cours du temps et dans l’espace. Ce qui nous semble aujourd’hui tabou ne l’était pas il y a peu, et inversement. À la CGT Sopra Steria nous avons confiance en la force des salarié·e·s pour nous organiser collectivement et donner un autre sens au travail.
Oui la retraite à 60 ans !